T3 Architecture Asia

Ho-Chi-Minh Ville

L’agence T3 architecture Asia est une agence franco-tchèque-vietnamienne basée à Ho-Chi-Minh Ville. Charles et Tereza Gallavardin et Thang Le Hoang sont à la fois acteurs du dynamisme vietnamien et spectateurs de la culture et du développement du pays.

Charles et Tereza Gallavardin ont vécu à trois reprises au Vietnam, ce qui leur a donné la possibilité d’aborder le pays sous différents angles.

Le premier contact a été une approche patrimoniale et sociale. Alors qu’il était étudiant en 1999, Charles Gallavardin a travaillé pour l’UNESCO sur les maisons traditionnelles dans la ville de Hué. La cité impériale est depuis 1993 inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO, mais au nord de la ville se trouve un ensemble de maisons tubes, traditionnelles du Vietnam, qui devaient être détruites. La mission de Charles Gallavardin a été de réfléchir à la rénovation de ces habitations afin de leur apporter le confort moderne. Ces modifications permettaient de conserver le tissu urbain face à la spéculation immobilière. Considérer ces édifices comme valeur patrimoniale est important car ils sont, d’un point de vue historique, une image et un caractère du Vietnam. D’un point de vue social, beaucoup de familles vivent dans ces maisons et s’en servent pour développer de petits commerces ou un micro entreprenariat familial que l’on retrouve un peu partout au Vietnam et qui forme un tissu économique dense à part entière.

Charles et Tereza Gallavardin sont ensuite revenus au Vietnam en 2003, à Ho-Chi-Minh Ville. Elle, était salariée chez Vo Trong Nghia Architects, le leader ultra médiatisé de la nouvelle scène architecturale vietnamienne. Lui, travaillait pour l’ONG « ville en transition », qui a pour but l’amélioration des conditions de vie dans les zones de pauvreté en milieu urbain.

Le Vietnam commençait à s’ouvrir à l’économie de marché à cette époque, ce qui provoquait un exode rural massif et le développement rapide et souvent non maîtrisé de la ville. Pour endiguer ce phénomène, le gouvernement avait interdit les déménagements des habitants des campagnes vers la ville sauf si la personne possédait déjà un emploi en ville. Des milliers de migrants illégaux, 300 000 par an, se retrouvaient dans des bidonvilles « non-officiels » en périphérie des villes. Le travail de l’ONG était de prouver que les migrants vivaient bel et bien là, et de les aider en montant des microprojets. Ainsi en 2005, ils développèrent un projet de logements collectifs et d’accession à la propriété, en micro-finance, dans le district 6 de Ho-Chi-Minh Ville. Le projet socio-économique aidait les familles à contracter un prêt grâce à leur activité de micro-entreprenariat familial. Avec les finances obtenues, un tiers des familles quitta le bidonville, un tiers y construisit sa propre maison et le dernier tiers investit dans les logements collectifs.

Le bâtiment se définit en 3 points : une économie de moyen, une prise en compte des façons d’habiter des familles et des conditions climatiques tropicales.

Les typologies des logements étaient variées et les possibilités d’extension (loggias, mezzanines pouvant être aménagées) nombreuses. Cela permettait aux familles de gérer les évolutions et les besoins. La construction a également de grandes coursives communes servant à la sociabilité et à la continuité de la vie commune développée traditionnellement à l’extérieur des maisons au Vietnam.

Pour les conditions climatiques, des moyens économiques de conception ont été utilisés : double toiture pour protéger du soleil, appartements traversants pour la ventilation…

Leur dernier séjour au Vietnam est de 2007à aujourd’hui : cette fois, ils vinrent pour créer T3 Asia, prolongement de l’agence T3 créée en France avec d’autres associés. Leur but était d’apporter leurs connaissances bioclimatiques pour des projets au Vietnam. Seulement à l’époque cela intéressait peu de monde, car peu y était sensibilisé. Selon T3 le prix élevé du foncier et la recherche de symboles de richesses dans les logements comme la clim, de très grandes surfaces, des pièces gigantesques souvent vides, des parcelles remplies au maximum influent sur la qualité et la définition des logements. Ainsi, les parcelles de 5x20m des maisons tubes traditionnelles composées de 2 niveaux et de 2 patios permettant la ventilation traversante et l’éclairage naturel, sont aujourd´hui remplies au maximum (sur toute l’emprise et la hauteur possible), ce qui bloque la circulation de l’air et la lumière.

Dans ces conditions, T3 ont abordé l’écologie par le biais de l’économie. Ainsi, leurs concepts écologiques au Vietnam sont la ventilation naturelle, la double toiture pour protéger du soleil, l’orientation Nord-Sud, car dans les tropiques ce sont les orientations Ouest-Est les plus chaudes, les chauffe-eaux solaires et l’utilisation du low-tech(QUEZACO) pour éviter l’inertie. Ces principes trouvent échos chez leurs clients privés.

Ils nous expliquent également qu’au Vietnam, l’organisation des maisons suit les principes Feng-Shui. Cela peut être la présence d’un point d’eau dans le logement (aquarium, fontaine…), l´’orientation du lit, des pièces, le nombre de marchesd’un escalier, par rapport à la numérologie du client… Ces principes sont un mélange de superstitions et d’organisation pour une harmonisation des espaces. Là encore la tradition se perpétue mais se heurte à une cohabitation parfois absurde avec les logements contemporains, par exemple quand le maître Feng-Shui reçoit un pot-de-vin pour que certains préceptes ne soient pas appliqués pour faciliter la construction.

En termes de matériaux, le choix actuel est limité : le béton, la brique et les carreaux de plâtres sont largement utilisésdans la construction. Les matériaux plus traditionnels comme le bois, le bambou, la pierre ou la terre sont encoreemployés chez certaines ethnies rurales minoritaires mais dans les villes, ils ont une image de pauvreté. De plus, le bois et le bambou nécessitent beaucoup d’entretien et sont peu durables. Enfin à cause de la déforestation massive au Vietnam, le bois de bonne qualité provenant de filières suivies coûte très cher.

Le rapport à la nature des vietnamiens est ambivalent. D’un côté on trouve dans chaque maison des dizaines de plantes en pots, majoritairement pour cuisiner mais aussi pour la décoration, et dans les rues la végétation déborde de partout. D’un autre côté, le pays souffre de la déforestation, d’un usage intensif des ressources naturelles et d’une expansion urbaine importante.

T3 essaie donc de promouvoir dans leurs projets de la pleine terre et de la végétation afin d’apporter de l’ombre, des courants d’air et une perméabilité des sols.

Finalement au Vietnam le dynamisme est de mise et les goûts changent vite. C’est pour cela que les méthodes et les façons de faire traditionnelles évoluent, disparaissent et se mélangent à l’époque contemporaine. Dans cette effervescence parfois chaotique mais exaltante, T3 s’en sort en étant polymorphe, en avançant pas à pas, en s’adaptant tout en proposant sans cesse, et ainsi participe aux fondations évolutives de la construction vietnamienne.

P1330327 Kokois concept store – Ho Chi Minh Ville © Le Voyage Habité

Lien vers le site internet des architectes : http://www.t3architecture-asia.vn/