Plan B Arquitectos

Medellin

Federico Mesa, nous a permis de comprendre l’évolution et les changements de la ville de Medellin. Historiquement connue comme la ville la plus dangereuse du monde, l’ancienne ville de Pablo Escobar a su se transformer en quelques années et elle est aujourd’hui une destination touristique. Cette métamorphose est due à une volonté politique forte et à une acupuncture urbaine réfléchie.

Pour désenclaver les quartiers et tenter de désamorcer l’escalade de la violence, la ville a utilisé une méthode que Federico Mesa qualifie d’Haussmanienne.

La ville a mis en place un important système de réseaux de transports en commun permettant d’ouvrir les quartiers les plus éloignés. Pour atteindre les quartiers à flanc de colline, les plus pauvres et les plus enclavés, il a fallu être ingénieux. Des téléphériques et des escaliers mécaniques ont été installés se connectant au métro aérien, véritable colonne vertébrale de Medellin.

De plus, des équipements publics, scolaires et culturels tels que des écoles, des collèges, des crèches et des bibliothèques ont vu le jour au cœur des quartiers défavorisés.

Tous ces équipements ont été pensés comme des espaces publics, une notion importante pour les habitants de Medellin, car jusque-là, l’insécurité dans les quartiers les poussaient plus à rester chez eux qu’à investir la ville.

Ces programmes de construction ont été soumis à des concours ouverts d’architecture, permettant à tout architecte d’y participer et générant des constructions diversifiées et de qualité.  

Enfin, le développement de ces éléments, voies de transport et équipements publics, a permis de remodeler et de désincarcérer des tissus urbains soumis à la violence. Cependant, la relocalisation des habitants expropriés pour récupérer le foncier nécessaire n’a pas été à la hauteur des autres interventions dans la ville. Ils ont été déplacés encore plus loin, aux frontières de la ville dans des grands ensembles de plus de quinze étages. Selon Federico Mesa, ces constructions sont complètement déconnectées de leur contexte et hors du temps. Alors qu’on tente de remodeler ce type de bâtiments et de quartiers en Europe en les « dédensifiant » ou en les déconstruisant, on en construit à grande échelle ici et on y concentre une population défavorisée. Ces bâtiments deviennent des espaces où les problèmes sont exacerbés et où la question de la violence n’est absolument pas résolue.

Malgré cela, la politique urbaine de Medellin a eu du bon et a permis des changements importants dans la ville  notamment une amélioration des conditions de vie. Avant, la ville était stratifiée avec des quartiers propres à chaque couche sociale sans mélange de la population. Des frontières invisbles empêchaient les habitants de sortir ou de rentrer dans tel ou tel quartier sous peine de graves violences. Sans qu’il ait aujourd’hui plus de mixité au sein des quartiers, il y a davantage de rencontres entre les populations, notamment grâce au développement des axes de transports et aux programmes scolaires de qualité. La municipalité tente de combattre les différents freins à l’amélioration du cadre de vie. Elle a, par exemple, mis en place des bus scolaires pour ramasser les élèves ne pouvant franchir les frontières invisibles pour se rendre à l’école.

Si la ville s’est impliquée sur le plan de l’urbanisme et des équipements publics, Federico Mesa regrette cependant le manque de prise en compte de la question du logement. Très peu de logements sont commandés par le gouvernement ou par la ville et s’ils existent, ils sont soumis à des budgets ridiculement bas, ne permettant pas de construire des logements de qualité.

Il n’y a pas de réglementation pour les logements en Colombie, les surfaces sont souvent très petites afin de construire au moindre coût. De plus il n’y a pas de réflexion dans les typologies et tous les appartements sont prévus pour une famille type de quatre personnes.

Aujourd’hui à Medellin ce sont les privés qui construisent du logement sous forme de tours et ce, sans planification urbaine. Les propriétaires terriens densifient leurs parcelles en pleine ville et construisent des tours au milieu de quartiers résidentiels.

Pour Plan B, comme pour la plupart des architectes en Colombie, la commande de logements consiste essentiellement en la création de maisons individuelles pour des clients aisés

Pour Federico Mesa, construire en Colombie offre une liberté qu’on ne trouve pas en France. D’abord avec le système de concours ouverts qui donne la possibilité à tous les jeunes architectes de se lancer et tire vers le haut la qualité architecturale. Cependant ces concours ouverts peuvent rapidement devenir un gouffre financier pour les agences car cela devient une façon pour certains commanditaires d’obtenir du travail gratuit. La liberté de construction en Colombie est également possible grâce à la flexibilité, aux capacités artisanales et créatives des entreprises. On ne trouve pas en Colombie de catalogues de produits standardisés (portes, fenêtres, matériaux…) auxquels l’architecte doit se limiter. Le produit peut être créé par un échange avec les entreprises  qui sont capables de développer des prototypes avec un simple détail de principe.

Medellin est aujourd’hui reconnue mondialement pour le travail urbain engagé. Pour Federico Mesa, la ville a su endiguer des problématiques sociales et redynamiser une des cités les plus dangereuses du monde grâce à des travaux d’urbanisme, une grande liberté et ouverture dans l’architecture. Il s’agit aujourd’hui de continuer le développement urbain et social engagé et ne pas se contenter d’une première partie réussie. Enfin, si plan B et d’autres agences ont su profiter de la liberté architecturale pour développer des projets ambitieux et réussis, il faut réussir à intégrer cette liberté dans un développement urbain raisonné.

P1350446 4 Escenarios Deportivos – Medellin © Le Voyage Habité

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